La saga Alfa Romeo GTV : jamais trois sans quatre ?

« GTV » (Gran Turismo Veloce), une appellation apposée depuis le milieu des années 1960 sur des coupés Alfa Romeo emblématiques. Jouissant d’une image historiquement sportive, la marque italienne a en effet toujours accordé beaucoup d’importance aux coupés qu’elle a conçus, ces derniers incarnant la philosophie et le savoir faire Alfa Romeo.


Le sigle « GTV » possède une histoire à travers trois modèles et peut être aussi un avenir, avec un projet malheureusement aussi ambitieux qu’incertain.

L’avènement du « Gran Turismo Veloce » avec les coupés « type 105 »

En 1963, Alfa Romeo lance la Giulia GT, version coupé de la berline Giulia sortie en 1962. Il s’agit du premier modèle produit dans la célèbre usine d’Arese. Doté d’un bloc de 1570 cm3 de 103 ch alimenté par deux carburateurs double corps Weber, le premier de la lignée des coupés « type 105 » trouve immédiatement son public. On doit sa ligne à la fois tendue et fluide au coup de crayon du jeune Giorgetto Giugiaro âgé de 22 ans seulement, alors salarié du maître Bertone, d’où le surnom de « Coupé Bertone. »

🔺La Giulia GT, premier coupé de la série « 105 ».

Une version cabriolet très réussie, la Giulia GTC, sera rapidement commercialisée dès 1965 mais ne rencontrera malheureusement pas le succès avec seulement 1024 exemplaires vendus.

En 1966, Alfa Romeo produit la Giulia Sprint GT Veloce et son bloc de 1.6 l. fort de 106 ch disponibles à tous les régimes, améliorant ainsi l’agrément mécanique de l’auto.

Cette même année, la « Giulia GT Junior » fait son apparition en guise d’entrée de gamme avec sa finition moins cossue et son 1300 cm3 de 89 ch distillant des performances honorables.

En 1967, c’est au tour de la 1750 GT Veloce d’être commercialisée. Mue par le moteur du Spider Duetto de 118 ch, la 1750 GT Veloce constitue alors la déclinaison sportive de la gamme.

🔺L’intérieur soigné de la 1750 GT Veloce baptisée « 1750 » en hommage à un célèbre modèle Alfa d’avant-guerre, sa cylindrée étant en réalité de 1779 cm3.

Le modèle connaîtra son apogée en 1971 avec l’arrivée de la 2000 GT Veloce (Tipo 105.21, aussi appelée « Giulia 2000 GTV ») dotée d’un moteur de 1962 cm3 développant 132 ch, le graal des coupés « type 105 ». Ses performances sont à l’avenant : 0 à 100 km/h en 9,2 s, vitesse de pointe de 193 km/h et le km DA en 30,8 s.

🔺La 2000 GT Veloce : l’ultime coupé « type 105 ».

Le coupé Giulia qui en a d’ailleurs perdu le nom à compter de 1967, sera finalement commercialisé jusqu’en 1976.

Ce coupé sportif, confortable et bien fini fera date et amènera naturellement Alfa Romeo à lui assurer une descendance digne de ce nom : l’Alfetta GT.

L’Alfetta GT/GTV : un coupé moderne et polyvalent

La Berline Alfetta, du nom des deux voitures ayant permis à Alfa Romeo de remporter le 1er championnat du monde de F1 en 1950, est apparue en 1972. Il s’agissait d’une berline élégante et moderne entièrement nouvelle : la dernière voiture développée par Alfa Romeo avant son rachat par le groupe Fiat en 1986.

Dès 1974, Alfa Romeo sortira le coupé Alfetta GT, à la fois macif, élancé et aérodynamique avec un CX de seulement 0,39. Ce coupé doit ici encore son design original aux lignes tendues à Giorgetto Giugiaro.

Côté motorisation, Alfa Romeo a tout d’abord doté l’Alfetta GT d’un seul et unique 1,8 l. de 122 ch issu de la berline Alfetta dont elle était dérivée. Ce moteur lui permet d’emblée d’afficher d’honnêtes performances agrémentées par des qualités routières de haut niveau.

Rapidement, L’Alfetta GT est proposée avec un petit 1,6 l. développant 109 ch la rendant plus accessible. En 1976, l’Alfetta GT est rebaptisée GTV 2000. À cette occasion, le 1,8 l. laisse sa place à un bloc de 2 l. d’une puissance identique de 122 ch, cependant accessibles moins haut dans les tours.

Il faudra attendre 1978 pour voir le 2 l. monter à 130 ch sur la GTV 2000 L, puis la fin de l’année 1980 pour que le fameux V6 « Busso » (du nom de l’ingénieur qui en assura la conception), fasse son apparition sous le capot du coupé italien : c’est la naissance de la mythique GTV6. Alimenté par une injection Bosh, ce moteur brillant de 2492 cm3 à la sonorité exceptionnelle développait 160 ch. Les performances s’avèrent alors suffisantes à défaut d’être exceptionnelles avec un 0 à 100 km/h en 9,6 s, 214 km/h en vitesse de pointe et le km DA en 30,4 s. À l’arrivée de la GTV6, Alfa Romeo procède également à des retouches esthétiques de l’auto qui adoptera désormais des pare-chocs en plastique, un nouveau tableau de bord et un bosselage sur le capot pour distinguer les versions dotées du fameux V6 dont le coffre et les vocalises furent les principaux attraits.

De nombreuses versions limitées, destinées à différents marchés verront le jour. On citera notamment la « GTV Grand Prix » produite à 600 exemplaires (1981) ou encore la « GTV Production » limitée à 300 exemplaires (1984).

Toutes versions confondues, Alfa Romeo ecoulera près de 138 000 Alfetta GT/GTV/GTV6 entre 1974 et 1987 : un joli succès commercial pour ce très beau coupé.

L’Alfa Romeo GTV « type 916 » : belle, imparfaite, italienne…

En 1995, Alfa Romeo « remet le couvert » et sort un nouveau coupé GTV, la GTV « type 916 », après l’avoir présenté au salon de l’automobile de Paris en octobre 1994.

La nouvelle GTV a tout pour plaire ou presque : une ligne magnifique signée Enrico Fumia de la maison Pininfarina, des moteurs vivants ainsi qu’un tarif bien placé dans sa catégorie. Reste que son comportement routier se révélera un peu juste et en tout cas en deçà de la rigueur de ses lignes en raison d’une motricité perfectible.

Basée sur la plateforme de la Fiat Tipo, la GTV type 916 est disponible avec deux motorisations lors de son lancement : le nouveau 4 cylindres 2 l. TS (Twin Spark, pour double allumage) avec variateur de phase développant 150 ch et le plus classique V6 « Busso » 2 l., à deux soupapes par cylindre, avec un turbo Garrett T25 et overboost, offrant 201 ch.

L’agrément mécanique est au rendez-vous et les performances d’emblée convaincantes :

  • le 2 l. TS abat le 0 à 100 km/h en 9,1 s, le km DA en 30,2 s et pointe à 217 km/h,
  • le V6 2 l. turbo réalise ces exercices en respectivement 7,3 s et 28 s, en se permettant d’atteindre 239 km/h.
🔺La GTV, ici dans sa version 2 l. TS

Le cabriolet GTV, dit « Spider », hérite  du 2 l. TS de 150 ch présent sur le coupé ainsi que d’un V6 3 l. 12 soupapes non suralimenté de 192 ch.

En 1998, la GTV revoit sa finition à la hausse ainsi que son offre de motorisations pour introduire un petit 1.8 l. TS de 144 ch, tandis que la version 2 l. TS passe à 155 ch et le V6 3 l. à 220 ch (24 soupapes au lieu de 12) tout en bénéficiant d’un 6ème rapport. Le V6 2 l. sera quant à lui retiré du catalogue en 2001.

En 2000, l’usine d’Arese d’Alfa Romeo sera mise en sommeil et la GTV cessera d’y être produite ; sa fabrication se poursuivra alors dans l’usine de San Giorgio Canavese de Pininfarina.

Un restylage aura lieu en 2003. La GTV hérite alors d’une nouvelle face avant inspirée de la compacte 147.

🔺Le Spider restylé.
🔺Le coupé GTV restylé en action.

La GTV se voit également greffer deux motorisations remplaçant les précédentes : un nouveau 2 l. JTS de 165 ch, le V6 « Busso » passant quant à lui à 3,2 l. pour développer la bagatelle de 240 ch exploités dans une véritable symphonie à l’italienne laissant à jamais nostalgiques ceux qui ont eu l’occasion d’en profiter…

🔺La GTV dans sa version V6 3,2 l. 24 soupapes de 240 ch : le must !

Le V6 3,2 l. 24 V permet à la GTV de dépasser la barre symbolique des 250 km/h (255 km/h) et d’afficher des accélérations pour le moins vigoureuses malgré son poids conséquent (1445 kg) avec le 0 à 100 km/h en 6,5 s et le km DA en seulement 25,9 s.

La GTV « type 916 » finira sa carrière en 2004 sur cette belle note de sportivité après s’être écoulée à plus de 80 000 exemplaires, sans toutefois perpétuer le blason « GTV », laissant pour lui succéder le coupé GT. Mais est-ce vraiment la fin de cette appellation à l’histoire si chargée ?

Une future GTV à l’horizon ?

Alfa Romeo a frappé très fort au printemps 2018 en annonçant le retour de la GTV et de la vénérable 8C en 2022.

Le teaser de la marque montrait une silhouette des plus désirables agrémentée de quelques caractéristiques techniques presque métaphoriques pour la version Quadrifoglio : plus de 600 ch hybrides, une répartition idéale des masses à 50/50, une transmission intégrale et une habitabilité permettant d’accueillir 4 passagers.

La presse s’est alors évertuée à imaginer à quoi pourrait ressembler ce qui s’apparentait au coupé idéal selon la marque au Biscione.

🔺Le design de la future GTV était fortement inspiré de celui de la Giulia.

Malheureusement, les GTV et 8C ont été écartées des plans de la marque italienne au profit de la sortie d’un nouveau SUV citadin… L’année 2020, véritablement catastrophique pour la marque milanaise, ainsi que la rationalisation des coûts menée par le groupe Stellantis ont eu raison de ces deux beaux projets. Pourtant, la Giulia Quadrifoglio a enregistré des ventes supérieures à ses concurrentes BMW M3 et Mercedes C 63 AMG en Europe avec 639 exemplaires vendus en 2020, preuve qu’Alfa Romeo est toujours synonyme de sportivité dans l’esprit du public.

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La mise à l’écart du projet GTV (tout comme celui de la 8C) n’est pas une fatalité : l’histoire de l’automobile regorge de rebondissements et autres renversements de situation ayant donné lieu à la production parfois inattendue de voitures à succès.

Le coupé GTV est sans nul doute l’une des clés du redressement d’Alfa Romeo. Le retour d’Alfa sur le devant de la scène ne pourra en effet passer que par la commercialisation de ce type de modèles, emblématiques, affûtés et destinés à séduire des esthètes, adeptes de sportives exotiques au sang chaud, à l’italienne.

La patience est donc aujourd’hui de mise, la survie de la marque passant par une transition industrielle et commerciale dont chacun espère qu’elle sera la plus courte possible…

6 commentaires sur “La saga Alfa Romeo GTV : jamais trois sans quatre ?

  1. La présence d’Alfa Roméo en F1 , sous ce nom, est bien une volonté des dirigeants de la marque de continuer à laisser l’empreinte sportive au plus haut niveau, même si ils ne sont pas les meilleurs, loin de là ! Peu importe, Alfa Roméo reste présent en F1 , dans les girons de Fiat, comme Ferrari, pour bien rappeler que la marque existe bien, ….enfin presque !

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